Mère Teresa Mise En Sainte Par Le Pape - Le Canard Enchaîné, 07/09/2016

ALLELUIA ! Depuis le 4 septembre, l'Eglise catholique compte une sainte de plus: Gonxha Bajaxhiu, religieuse albanaise plus connue sous le nom de Mère Teresa. Canonisée en grande pompe par le pape François. La fondatrice des Missionnaires de la Charité affiche pourtant des états de service pas tous charitables.

Si les innombrables diatribes contre l’avortement et la contraception de la nouvelle sainte ne détonnent guère dans le panthéon de l'Eglise, le sort que réservait Mère Teresa à «ses» pauvres et à «ses» malades se révèle plus décoiffant. La religieuse recueillait les mourants sur les trottoirs de Calcutta. mais c'était pour dédier leurs souffrances à la gloire du Très-Haut... Affirmant que «la lèpre [pouvait] être un très beau cadeau de Dieu», Teresa claironnait qu'«il y [avait] quelque chose de très beau à voir les pauvres accepter leur sort».

Forte de ces bons principes frappés au coin de la médaille miraculeuse, la religieuse refusait l'usage d'analgésique. Elle se contentait de distribuer un peu d'aspirine et de vitamines à ses agonisants.

Pour elle, la douleur était «rédemptrice». Et pour mieux assurer leur salut, les malades étaient lavés à l'eau froide. Parce que c'était la «volonté de Jésus», comme le raconte un ancien volontaire (CNN,4/9).

Mais. si Mère Teresa a décroché le pompon de la sainteté, c'est d'abord grâce à ses miracles. Elle en affiche deux au compteur, comme l'exige la règle canonique. Le premier - une femme enceinte guérie d'un «cancer incurable de l'estomac» après l'imposition d'une médaille de Mère Teresa sur son ventre - avait valu à la religieuse d'être béatifiée (dernière étape avant la canonisation) en 2003 par Jean-Paul II.

Depuis, le «New York Times» a découvert que, malgré un dossier d'instruction de près de 40 000 pages, les experts du Vatican avaient juste «oublié» d'interroger le médecin traitant de la malade. Lequel a affirmé que sa patiente n'avait pas souffert d'un cancer mais d'un kyste, qui avait été soigné par des médicaments classiques.

Peu porté sur le surnaturel, Benoît XVI avait laissé roupiller le dossier Teresa. Mais l'actuel pape François a décidé de faire avancer l'affaire au canon. Un deuxième miracle a donc été reconnu dare-dare en 2015: celui d’un père de famille de 38 ans qui aurait été guéri de multiples tumeurs au cerveau en un clin d'œil après avoir prié Mère Teresa avec son épouse.

Son cas a été jugé par le Vatican plus édifiant que celui d'un prêtre indien qui avait affirmé avoir été débarrassé de ses calculs dans l’urètre le jour du dixième anniversaire du décès de la religieuse. Sans doute, une erreur de calcul du Saint-Siège.

H. L - Le Canard Enchaîné, 07/09/2016